Médiathèque Georges Brassens

Jean Clair, directeur du Musée Picasso, était l'invité de Michel Ciment en 1992 pour parler de la cinématique présente dans l'art de Picasso, cette science des mouvements à l'œuvre dans sa peinture et qui défie l'antinomie fondamentale entre une peinture immobile et un cinéma mouvant.

Picasso, peintre de la métamorphose

Les liens qu'entretenait Picasso avec le cinéma sont des liens privilégiés et étroits. Jean Clair le définit comme un homme du changement, de l'imprévisible, "de la métamorphose du trait". Sa création est profondément d'ordre cinématique et rencontre donc le projet cinématographique malgré la fixité de la peinture.

"Picasso changeait tout en art", affirme Jean Clair, il était toujours en train de créer, fabriquer avec ses mains. Picasso ne s'est jamais dit abstrait, et c'est bien normal car sa peinture est hantée par la réalité mais il combine à la fois l'art du magicien et celui du photographe.

L'influence du cinéma sur l'œuvre de Picasso est visible, particulièrement dans les variations de plans, de cadrages dans ses peintures comme si l'on voyait à travers un zoom, un détail qu'on agrandit.

"Le Mystère Picasso" de Clouzot

Picasso s'est prêté au cinéma pour le film documentaire de Henri-Georges Clouzot, Le Mystère Picasso sorti en 1955. Ce film montre le peintre au travail, en train de peindre un tableau palimpseste "qui s'efface, se détruit et se reconstruit seconde après seconde". C'est "fascinant" selon lui de voir la création en train de se faire comme une mise à nu des strates de la création. Le film a su s'extraire d'une temporalité paradoxale qui semble en soi insurmontable montrant à la fois la main du peintre et le tableau se faisant dans toute sa sédimentation. C'est un témoignage extraordinaire du "moteur énergétique" qu'était Picasso.